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Psychanalyse et animaux.

les oiseaux sauvages ne sont pas responsables de l'épizootie de grippe aviaire. une seule solution: arrêter l'élevage.

26 Mai 2006, 10:36am

Publié par Jo benchetrit

 Les oiseaux sauvages victimes des virus venant des élevages. La FAO le dit...en mai et hésitait encore en mars.

(cf mon article de la veille sur la question)

Cet article du Monde vient confirmer ce que les ornithologues clament depuis des mois.

 

Si on veut se garder des épizooties , une seule solution: arrêter l'élevage.

Jugez-en vous-même:Poulet d'élevage sur un marché à Kolkata, dans l'Est de l'Inde, le 22 mars 2006. | REUTERS/PARTH SANYAL

Élevage de poulets en Inde. Quel être vivant pourrait-il tenir dans de telles conditions sans avoir ses défenses immunitaires à zéro? Regardez et dites moi, si vous y étiez, croyez vous survivre longtemps? Ici, Treblinka est sous vos yeux mais vous ne le voyez pas, car les humains ont de votre point de vue tous les droits, non?

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 Haro sur les migrateurs ! Depuis l'été 2005 et la propagation rapide du virus H5N1 loin de l'Asie, là où il est apparu, les oiseaux sauvages sont régulièrement montrés du doigt. Dans un premier temps, les organisations internationales chargées de la lutte contre l'épizootie y ont vu les principaux - voire les uniques - responsables de la marche du virus vers l'ouest, puis le sud. Au contraire, pour de nombreux ornithologues, la faune sauvage s'infecterait occasionnellement au contact des élevages de volailles, mais sa contribution à la diffusion de l'épizootie ne serait que marginale.


 
"Nous pensons que les migrateurs peuvent jouer un rôle important dans la propagation à longue distance du virus, mais nous n'excluons pas la voie du commerce d'animaux ou de produits infectés, résume Samuel Jutzi, directeur de la santé et de la production animales à l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO). Aujourd'hui, l'industrie avicole est le secteur le plus globalisé de la production animale, au travers des sous-produits de la volaille, mais aussi des "poussins d'un jour "(one day chicks, en anglais), qui circulent par millions."
En février, l'apparition de la maladie au Nigéria (le premier pays africain touché) - dans un élevage industriel de plus de 40 000 bêtes - est, selon le gouvernement nigérian, le fruit d'importations illicites, sans doute de ces fameux "poussins d'un jour". La FAO attend toujours des preuves formelles avant de se prononcer.

Au-delà du cas nigérian, les ornithologues pointent certaines incohérences dans les scénarios impliquant les oiseaux sauvages. "Il n'y a pas de route migratoire importante de l'est vers l'ouest, et la sortie du virus de la Chine vers l'Europe ne peut pas s'expliquer par les migrateurs", dit ainsi Richard Thomas, un des responsables de Birdlife, une association d'ornithologues basée à Londres. "Sur les cartes, ajoute Olivier Dehorter, spécialiste de la biologie des populations d'oiseaux au Muséum national d'histoire naturelle (MNHN), on distingue d'ailleurs assez clairement que les foyers infectieux suivent le tracé du Transsibérien."

De même, ajoute le chercheur, qui n'exclut pas une contribution mineure de la faune sauvage à la propagation du virus, "la seconde vague de contaminations qui a touché la Turquie semble plus liée à des activités humaines - commerce, déplacements, etc. - qu'à des mouvements d'oiseaux sauvages." Par ailleurs, dit Pascal Orabi, ornithologue à la Ligue de protection des oiseaux (LPO), "l'Australie et la Nouvelle-Zélande, lieux d'hivernage de certaines espèces qui survolent l'Asie, sont restées indemnes".

Un argument fort en faveur de l'implication des migrateurs reste la découverte en Chine, sur le lac de Poyang (Le Monde du 8 février), de canards sauvages porteurs sains du virus, c'est-à-dire capables de le transporter sur de longues distances. Mais la faune sauvage ne peut pas être tenue pour seule coupable, selon Ward Hagemeijer, l'un des responsables de Wetlands, l'organisme d'étude des oiseaux d'eau basé aux Pays-Bas, qui a mené une étude avec la FAO et le Centre international de recherche pour l'agronomie et le développement (Cirad). "Nous avons prélevé près de 7 000 oiseaux sauvages en Afrique, et aucun porteur sain du virus n'a été détecté, précise M. Hagemeijer. Même chose dans l'Union européenne, où 10 000 oiseaux apparemment sains ont été testés, sans résultat positif." Les résultats officiels de ces prélèvements, qui se poursuivent, devraient être connus dans les prochaines semaines.

Face aux objections des ornithologues, les virologues brandissent un argument-massue : celui de la génétique. "Le fait que la souche virale identifiée en Europe et en Afrique soit presque identique à celle retrouvée sur les oiseaux migrateurs trouvés morts à la mi-2005 sur le lac de Qinghaï (en Chine centrale) est la meilleure preuve que les migrateurs jouent un rôle majeur dans la diffusion du virus", dit le virologue néerlandais Albert Osterhaus. Toutefois, selon des travaux publiés en juillet 2005 par la revue Science, cette même souche virale avait été identifiée quelques mois plus tôt sur des volailles domestiques en Chine méridionale.

Autre élément à charge, observe M. Osterhaus, "les cas surviennent toujours dans les zones de grands rassemblements d'oiseaux sauvages". Mais les choses peuvent être vues sous un autre angle. "Les migrateurs atteints par virus sont, dans 70 % à 80 % des cas, trouvés à proximité d'élevage de volailles, rétorque ainsi l'ornithologue Guy Jarry, ancien directeur-adjoint du Centre de recherche sur la biologie des populations d'oiseaux (CRBPO). En outre, les volatiles concernés sont généralement d'un grégarisme très accentué et passent beaucoup de temps les uns très proches des autres : si la pathologie circulait de manière importante dans la faune sauvage, on assisterait à des hécatombes massives, ce qui n'est pas le cas."

D'autres questions demeurent. Une fois que le virus est apparu dans une région, les causes du bourgeonnement des foyers infectieux sont méconnues. Le commerce de proximité, les trafics et l'absence de déclaration de la maladie dans les élevages peuvent être invoqués. Une récente étude américaine a par exemple montré que la diffusion d'une influenza aviaire faiblement pathogène (H6N2), de 2000 à 2002 en Californie, était principalement liée au transfert des oeufs depuis les exploitations avicoles jusqu'aux usines de conditionnement. En particulier, la réutilisation de certains matériels souillés par les fientes a contribué à disperser le virus.

L'enchaînement des événements au début de l'épizootie comporte aussi des zones d'ombre. L'étude des variations génétiques - dans l'espace et le temps - du virus H5N1 donne des informations assez précises : le précurseur du virus actuel est apparu dans le sud de la Chine, sans doute vers 1996. Il a été introduit au Vietnam en trois vagues successives, en 2001, 2003 et 2005, sans doute par le biais des commerces locaux, de la circulation des coqs de combat, etc. Mais, précise Samuel Jutzi, "son apparition quasi simultanée, en 2004, dans près de dix pays de l'Asie du Sud-Est demeure inexpliquée". De même, ajoute le responsable de la FAO, "nous ne savons pas non plus pourquoi le virus est resté confiné en Asie pendant deux ans avant de se répandre, comme c'est le cas depuis quelques mois."

Stéphane Foucart
Article paru dans l'édition du 30.03.06

 

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