Repas totémique, Corrida, l'échec du Christ, de la civilisation et de l'humanisme devant la barbarie?
Isaïe
« Qu’ai-Je à faire de cette multitude de victimes que vous M’offrez ? dit le Seigneur. Tout cela M’est à dégoût. Je n’aime point les holocaustes de vos béliers, ni la graisse de vos troupeaux, ni le sang des veaux, des agneaux et des boucs. Lorsque vous veniez devant Moi pour entrer dans Mon temple, qui vous a demandé que vous eussiez ces dons dans les mains ? »
Isaïe 1,11-12
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Le monde avait déjà commencé depuis 15 milliards d’années, la terre avait 4 milliards d’années et demi, la vie, 3 milliards et demi…la plupart des espèces avaient pour certaines des milliards d’années, pour beaucoup des centaines de millions d’années, quand l’homme s’est annoncé, il y a une virgule de temps, d’abord sous la forme rustique de nos nombreux ancêtres hominidés, il y a 2,5 millions d’années.
Puis notre sous –espèce de sapiens, homo Sapiens Sapiens, il y a peut-être 30.000ans seulement, donc très récemment, sous la forme que nous connaissons dite aussi d’homme moderne.
Les autres hommes disparurent comme notre cousin et contemporain Neandertal et nous sommes actuellement la seule espèce survivante de la famille des hommes.
Il fallut à la Terre entre 500millions d'années et 1 milliard d’années pour créer la vie. Il ne faudra peut-être pas 100.000 ans à l’homme pour rendre la vie si ce n’est impossible, du moins très hypothétique.
Nous aurions pu nous appeler l’homme du néant tant notre destructivité est grande.
S’il est une explication à cette destructivité, c’est ce qui fait de l’homme un être nihiliste : ses pulsions. C’est une grande différence par rapport aux autres du monde animal. Nous avons en fait remplacés nos instincts par des pulsions partielles.
Les conséquences sont assez catastrophiques. En effet, ces pulsions dites partielles, nous verrons pourquoi, sont au service de la pulsion de mort exclusivement. Les instincts le sont parfois un peu mais en grande partie sous la dépendance de la pulsion de vie.
« Il n'y a pas, d'apparence, chez les animaux, ni de viols, ni non plus de toutes ces complications, tout ce baratin qu'on fait autour. Ça se passe chez eux d'une façon pour tout dire civilisée.
Chez l'homme, ça fait ce qu'on appelle des drames [...]. Par quoi bien sûr tout le malentendu [...]. Plût au ciel que les hommes fassent l'amour comme les animaux, ça serait agréable. » Lacan. Lors d’une conférence à Milan.
C’est ainsi que les hommes sont, et ce sans doute depuis qu’ils parlent un langage symbolique qui « tue» le réel et qui en construit un autre, des bêtes particulièrement tordues.
Le mot tue et fait la chose, en résumé. L’homme est capable de se passer, du moins subjectivement, du réel réel, pour le remplacer par un réel imaginé, et symbolisé.
En d’autres termes, un réel rêvé, qui n’a plus rien avoir avec le réel d’origine, lui, toujours là, mais invisible à notre rêveur. Si bien que pour le percevoir, il lui faut combattre ce principe qui lui fait fuir toute source de réveil, donc de stress : le principe du plaisir.
Ce principe est lui-même au service de la pulsion de mort. Il entraîne vers la néantisation de ce qui excite. Donc, en lui obéissant le sujet tend vers le plus grand calme.
La civilisation, selon « Totem et Tabou » de Freud, a commencé par un repas. Le « repas totémique », cette identification archaïque par incorporation au père barbare et donc jouisseur, égoïste et égocentriste tué de la Horde primitive ouvrait une page plus policée dans le monde des hommes qui prirent ainsi conscience de leur dangerosité.
La Loi fit sentir sa nécessité, pour se protéger les uns des autres de leurs propres pulsions barbares. Ils ont en effet tout juste eu le temps de voir qu’ils étaient comme le père, barbares, pour comprendre que ce serait invivable s’ils ne trouvaient de parade, et pour conclure sur la nécessité de la Loi.
La mort du père comme clé pour sauver les hommes est certes un mythe, mais tout de même il est troublant d’en rencontrer un écho si parfait dans l’histoire religieuse du christ.
On y trouve à peu près tout, mais déformé comme on l’observe dans le travail du rêve, avec, dans le désordre le père, ici Dieu, son fils, qui est en même temps ce père et le père de ses disciples d’abord.
On en trouve un, Judas, qui représente en fait tous les disciples, ses fils, le meurtre du père-fils et le repas totémique.
Certes, le repas, dite la cène, se passe avant sa mort, mais tout de même, avec l’incorporation du père fait homme sous la forme de son fils et dont on se souvient les paroles : « Ceci est mon corps. Ceci est mon sang ».
Offrande troublante du père à la dent des fils, cette cène a quelque chose de primitif. Elle vise à déculpabiliser les fils du meurtre du père.
Tout est prévu par Dieu. Il faut qu’il meure afin de libérer sa parole dans le monde. Et cette parole, c’est la Loi du père celle qui interdit aux fils de jouir de leurs pulsions partielles non sublimées.
Car, ne l’oublions pas, ce n’est pas réellement le corps du Christ, ce pain n’est que du pain, pas un être vivant, ce vin n’est pas du sang, mais du raisin. Mais l’homme n’est pas raisonnable, et la mort réelle du christ n’annonça pas, de par le fait de la jouissance associée à cette mise à mort, cette paix que son sacrifice prévoyait.
La souffrance est une forme de la jouissance et la religion qui idolâtre un supplicié et non un Dieu vivant peut très bien trahir l’esprit qui pourtant présidait à ce meurtre du père, et qui ouvrait sur la civilisation.
Il disait que, par son sacrifice, il était venu pour sauver les hommes…de leurs péchés… Mais on l’observe, ça a raté comme toutes les tentatives de débarrasser la Terre du propre de l’homme qui, ma foi, ne manque pas d’être sale, puisqu’il s’agit de ses pulsions à l’état brut, les barbares.
On ne donne pas à voir l’impensable d’une mise à mal d’un vivant, Dieu ou un animal comme un taureau, sans que la jouissance n’en demande encore.
Ce qui fait que contrairement à la légende entretenue par ceux qui y ont intérêt, la corrida n’a aucun effet cathartique.
Au contraire, elle provoque chez l’individu capable de jouir d’un tel spectacle une envie d’encore, en voir encore, tuer encore.
Ce n’est pas un hasard si la religion du christ est si présente dans les arènes et leurs coulisses. Les bénédictions de ces actes sacrilèges ne manquent pas pour exorciser le péché de cette répétition du meurtre du père.
Et l’inquisition peut témoigner de la difficulté de se déprendre de la souffrance, jouissance imposée par la force de ceux qui voulait du bien aux autres, bien entendu.
Loin de faire haïr la souffrance comme il le voulait, en voulant être le dernier sacrifié, le sacrifice du Christ ne servit qu’à entretenir la flamme de la jouissance que cet acte a fait naître. Que ceux qui ne savent pas qu’une croix est un instrument de torture me jettent la première pierre.