Réponse d'Aymeric Caron à Richard Millet dna sle Point du 14/11/19
Pas mal comme réplique, non?
J'ai lu ceci sur le face book d'A.Caron:
"A lire dans LE POINT de ce jeudi 14 novembre, ma réponse à l'écrivain Richard Millet qui la semaine dernière dans le même journal faisait l'apologie de la viande, et notamment de la viande de cheval...
"Depuis que le végétarisme s’affranchit de la suspecte marginalité dans laquelle lobbies et habitudes culturelles l’ont trop longtemps enfermé, la peur gagne les plus revendicatifs des mangeurs de viande. Le dernier en date à crier son désarroi est l’écrivain Richard Millet : ici-même, la semaine dernière, hissant les couleurs du drapeau carnivore, il lançait un appel à la résistance. Contre ses ennemis de la licence gustative, « ceux qui broutent l’herbe du nutritionnellement correct », il rassemblait les troupes de la France libre de ses choix alimentaires. Il clamait haut et fort son amour du steak, fût-il de cheval, et déroulait alors sa stratégie pour n’en être point privé un jour: discréditer les intentions soi-disant douteuses et immatures des opposants à la viande. Et faire passer les défenseurs des droits des animaux pour de méprisables illuminés. Classique. Mais intellectuellement malhonnête.
Le choix de ne plus manger d’animaux peut reposer sur différents critères, dont aucun n’emprunte au caprice : critères environnementaux, économiques, sanitaires ou éthiques. Mais l’argument moral du végétarisme est sans doute celui qui l’emporte sur tous les autres. Aristote avait relevé l’évidente continuité qui nous lie aux autres êtres vivants. Depuis, la science a fait bien davantage que confirmer cette intuition. Nous savons désormais avec certitude que les humains sont eux-mêmes des animaux et qu’il n’y a que des différences de degrés entre les espèces. Dès lors, la question des droits qu’il convient d’accorder à ceux que le spécialiste de l’évolution Richard Dawkins appelle nos cousins n’est plus secondaire : elle est essentielle. Parce que les autres animaux sont aussi dotés de raison et de sensibilité, parce qu’ils éprouvent du plaisir et de la souffrance, parce qu’ils sont des individus capables pour certains de développer une conscience d’eux-mêmes et de respecter une morale, nous ne pouvons plus aujourd’hui les traiter comme une matière première dont l’unique objet serait la satisfaction de nos plaisirs égoïstes, au premier rang desquels figure celui de nos papilles gustatives.
S’appuyant sur les études qui confirment les hautes capacités cognitives des dauphins, le gouvernement indien vient d’adopter une loi qui confère à ces cétacés le statut de « personnes non humaines » et a décidé, comme d’autres pays auparavant, d’interdire les delphinariums. Par ailleurs, depuis plusieurs années, de nombreuses personnalités des sciences et de la philosophie soutiennent le Projet grand singe, destiné à accorder aux gorilles, bonobos, orangs-outans et chimpanzés, dont la proximité avec l’homme n’est plus à démontrer, des droits essentiels. Ces initiatives sont raillées par quelques obscurantistes qui refusent d’ouvrir les yeux, traumatisés par la perspective de tomber du piédestal où la tradition cartésienne les a installés. Ils ne se rendent pas compte qu’au contraire, en rendant aux autres animaux la place qui est la leur, l’homme se sauve lui-même." "