Sur France Inter, philo et animaux. Peter Singer, Elisabeth de Fontenay.
J'aime bien la légende:
Professor Peter Singer of University of Princeton (on the right)
Elisabeth de Fontenay portrait par Arnaud Meyer photographe
A l'occasion de leur livre, Singer et E de F se sont confrontés sur France Inter.
Une modeste reflexion après avoir écouté ceci, ce que je vous invite à faire avant de lire ce qui suit . Ça se résume par : que de contradictions...surtout de mon lieu qui est celui du veganisme. Eviter tout utilisation de l'autre, y compris animal, car utiliser l'autre à son profit sans son consentement est en soi un abus. Est-ce que le droit des animaux ne peuvent pas etre ainsi definis? Simplement.
La tête au carré : Le droit des animaux http://www.franceinter.fr/player/reecouter?play=637078
Plus de détails sur cette émission : http://www.franceinter.fr/emission-la-tete-au-carre-le-droit-des-animaux
Sans vouloir offenser Elisabeth qui, pour sa part, ne voudrait pas "offenser le genre humain", Peter Singer lui fait remarquer que ce n'est pas le problème d'un philosophe que de se laisser borner ainsi sa réflexion par une telle considération. Elle évacue le problème du narcissime humain un peu vite à mon goût, alors qu'il s'agit bien de ça, qui empêche les hommes de pousser leur réflexion jusqu'à voir dans l'autre animal un semblable aussi respectable qu'eux. Ceci au sujet de l'extension des droits de l'homme aux grands singes, extension promue par Singer pour les epargner de la vivisection.
Moi, je ne voudrais pas non plus la blesser car nous, les "anti-specistes", doctrine et même notion qu'elle dit rejeter, et ne veut pas mettre sur le même plan que l'anti-racisme, avons puisé en elle, puits de science ( par son livre-phare et exceptionnellement riche, Le silence des bêtes) de quoi étancher notre soif de savoir ce qu'ont dit les philosophes depuis les premiers sur le problème du rapport des hommes aux autres animaux. L'observation de ce qui se passe dévoile que notre rapport aux bêtes est vicié et que ce qu'ils subissent de notre fait est définitivement intolérable. Surtout que, loin d'avoir progressé, nous avons régressé avec la phase dite révolution industrielle où tout devint produit, rentabilité, vitesse, non considération du vivant et, au final...nazisme! On trouve dans son livre l'oublié de l'écriture de certains auteurs fondateurs: à savoir ce qu'ils ont pu dire des animaux comme nos semblables en respectabilité et que chacun s'est empressé de ne pas lire.
Les hommes, depuis leur apparition en tant que parl'êtres, parlent des (autres) animaux.
Mais que d'inepties sont dites sur eux! Surtout dans le champ de ce TOC qu'on nomme "le propre de l'homme" dont la spécificité réside dans le fait que le plus souvent, il se réfère à des choses absolument improuvables et , à l'examen, c'est à dire en les confrontant avec ce quil conveint d'appeler la logique du Réel, bien improbables.
Animots ou animaux?
Imaginaire ou réel?
Quid du réel des animaux si on pense comme le font les humains, le réel avec du blabla? Parce qu'avec des mots du symbolique on peut très bien etre dans l'imaginaire et à côté de la plaque. Pourtant, nous devons raisonner pour que l'on retrouve avec la logique ce fameux réel oublié sous nos a priori divers. Mais le peut-on si on se préoccupe avec Elisabeth de savoir si, par exemple, avec la notion d'égalité de droits, qui recouvre la notion de semblable, on ne va pas offenser le "genre" humain?
Lorsque Galilée l'a fait, car en suivant Copernic, il a offensé le genre humain, il a "compris" qu'Elisabeth a raison d'être prudente: le genre humain peut être féroce si on le vexe. Et il s'est écrasé...Contrairement au téméraire Giorgiano Bruno qui a été brûlé en tenant bon sur ces certitudes scientifiques et philosophiques, montrant bien combien le genre humain s'embrase vite si on le déboulonne. Il est si attaché à être le centre du monde qu'il met ce monde-là à feu et à sang...jusqu'à ce qu'il n'y ait plus rien, son fantasme fanatique final: être le maître du monde, mais pas de n'importe quel monde: un monde vide.
C'est pour ça que, selon les animaux , ce genre humain a beaucoup à apprendre pour être vivable. Un mauvais genre, quoi!
Etre homme ou femme, en grammaire, c'est aussi être d'un genre. Nous, nous avons partagé le monde entre les animots et le genre humain! Les autres aussi, sont des personnes, dans leurs genres. Mais il est vrai que question mots, nous sommes imbattables. Anti-cartésienne et/ou cartésienne inconsciente, Elisabeth de Fontenay?
Propre de l'homme, pas beau ou au contraire à rechercher, Elisabeth de Fontenay?
Des droits pour tous ou espèce par espèce, donc specisme pour l'anti-speciste Singer? je veux bien que les uns n'aient pas les mêmes nécessités que les autres. Que certains, comme les crapauds, aient plus besoin que d'autres de traverser une route pour aller se reproduire dans la mare d'en face. Evidemment. mais le droit de se déplacer devrait être un droit animalier aussi!
Alors que nous qui souhaitons supprimer les frontières pour nous, nous avons quadrillé la nature de murs infranchissables, parfois réels comme les murs anti-bruits, ou virtuels comme les routes.
Mais comment faire? Des routes, il y en aura toujours. Et des voitures, comment savoir, avec le manque d'énergie prévisible, peut être que le monde va à nouveau utiliser les malheureux chevaux et boeufs...Ajoutant de la souffrance, encore.
Est-ce le propre de l'homme de faire du mal? Cette question mériterait à elle seule le livre que je voudrais écrire!
Au fond, ne sommes-nous pas tous attirés à tort ou à raison, par la notion du propre de l'homme, au point de ne pas arriver nous non plus(nous, les anti-spécistes) à nous défaire de ce TOC qui nous définirait définitivement comme non -animal. E.de Fontenay prétend n'avoir pas une position métaphysique quand elle revendique un statut à part pour notre espèce. Je ne vois pas, alors, à quel champ elle se réfère pour qu'on sache de quel lieu elle profère que l'homme, du fait de se dire "genre humain", en retirerait des droits supplémentaires. et ce nest ni theologique ni métaphysique!!! Menfin!
Dommage que beaucoup des défenseurs des animaux aient des contradictons ou des anomalies.
comme par exemple de parler d’euthanasie des enfants très handicapés, genre enfants legumes je presume! certes, il ne faut pas imposer une vie de misere et de souffrance à un individu.
mais c’est un autre sujet très sensible! Il aurait mieux fait de se taire à ce propos.
on arrive avec la bombe de la liberation animale...C’est déjà assez dur à digerer.
Elle se défend d'être ce qu'elle est à son corps defendant
essentialiste face à Singer. Hypothese personnelle:
ça provient de son histoire douloureuse avec la proximité dans sa famille d'un enfant handicapé, donc elle a besoin de dire que ce qui distingue le handicapé' dont helas parle Singer, de l'animal c'est qu'il aurait pu etre un homme à part'' entiere. Qu'il aurait pu voter, alors que l'animal, non. La singularité de l’espèce humaine. Produire des paroles qui donnent des actes. Pourquoi dire que ce n'est pas métaphysique? Il ne suffit pas de le dire.
Et affirmer que les animaux n'ont pas le sens de la responsabilité est absurde alors que ces êtres ont pour la plupart à assumer la survie de leurs enfants...la plupart trimant pour les nourrir. Car le propre de l'homme, c'est le supermarché!
Là, pour les autres animaux, c'est plus dur. Les oiseaux, par exemple, font de cet élevage DE LEURS ENFANTS un véritable apostolat allant jusqu'à se laisser quasiment crever de faim et d’épuisement pour eux. Singer comme de Fontenay d'accord pour dire : « je ne soutiens pas l’éthique animale distincte. »
Elle dit combattre le propre de l'homme et elle en égraine
QUELQUES UNS , dont justement celui de responsabilité.
Chacun, à la fois, défend et combat la même thèse en soi-même. On voit avec ces contradictions que nous sommes tous bourrés d'illogisme sur le terrain du rapport homme-animaux, car nous sommes humains aussi, donc aliénés par l'idéologie speciste qui se transmet de génération en génération, et risque de nous freiner dans notre réflexion.
Bref, une chatte n'y retrouverait pas ses petits.
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* Pour les biographies, j'ai glané ce qui suit pour vous:
On voit tout de suite que les 2 protagonistes ont en commun une abominable souffrance familiale, celle d'être de familles de victimes du nazisme. Je considere que le nazisme est ce qui se rapproche et doit se reprocher le plus de ce que subissent les animaux de notre fait.
Au contraire d'une minorité de juifs qui se mettent du côté des tortionnaires en étant, ça me dépasse, par exemple aficionados, beaucoup ont su hériter de la Thora l'injonction de ne pas faire souffrir les animaux. Mais surtout surtout, il en est qui ont su tirer enseignement de ce qu'ont subi leurs parents et grands parents en se plaçant du point de vue de la victime, donc du Juste qui s'y identifie spontanément.* Après, ça se fait plus ou moins bien...Chacun restant humain, donc faillible. Et le fait d'avoir subi un aussi terrible traumatisme peut aussi destabiliser.
Peter Albert David Singer,Peter Albert David Singer dit Peter Singer est un philosophe australien né le 6 juillet 1946. Il est titulaire de la chaire d'éthique de l'université de Princeton, et professeur à l'université Charles Sturt (Melbourne), en Australie.
Il a travaillé à deux reprises dans la chaire de philosophie de l'université de Monash, où il a créé le centre de bioéthique humaine. En 1996, il se présenta sans succès en tant que candidat Vert pour le Sénat australien. En 2004, il fut reconnu comme l'humaniste australien de l'année par le Conseil des sociétés humanistes australiennes. En dehors du milieu universitaire, Singer est surtout connu pour son livre La Libération animale, considéré comme le livre fondateur des mouvements modernes de droits des animaux. Ses positions sur des questions de bioéthique ont également suscité la controverse, notamment aux États-Unis et en Allemagne.
Les parents de Singer étaient des Juifs viennois, qui échappèrent à l'annexion de l'Autriche et prirent la fuite en Australie en 1938. Ses grands-parents paternels furent déportés à Łódź sans aucune nouvelle d'eux. Son grand-père maternel mourut dans le camp de concentration de Theresienstadt. Le père de Singer importait du thé et du café, tandis que sa mère exerçait la médecine. Peter Singer étudie au Scotch College de Melbourne, puis se dirige vers des études de droit, d'histoire et de philosophie à l'université de Melbourne où il obtient un Bachelor of Arts en 1967, et un Master of Arts pour son mémoire intitulé « Why should I be moral? » (« Pourquoi devrais-je être moral ? ») en 1969. Il reçoit alors une bourse d'études pour l'Université d'Oxford; son travail sur la désobéissance civile, supervisée par R.M. Hare, est sanctionné par un Bachelor of Philosophy en 1971, et publié sous la forme d'un livre en 1973 : Democracy and Disobedience. Par ailleurs, Peter Singer se dit lui-même végétarien, dans une interview donnée le 3 mai 2006 au magazine américain Mother Jones : « Je ne mange pas de viande. Je suis végétarien depuis 1971. »1.
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Très tôt, Elisabeth de Fontenay a rompu avec le catholicisme paternel pour épouser le judaïsme maternel. Elle s'en explique dans ces «Actes de naissance»
Nouvel Observateur
Elle n’avait encore jamais si clairement désigné sa déchirure originelle, ontologique. Elle cachait bien la blessure dont la souffrance a pourtant déterminé toute sa pensée philosophique, partagée entre la rhétorique enchantée de Diderot et le douloureux mutisme des bêtes. Elle a attendu d’avoir atteint l’âge où l’enfance réclame son dû pour formuler enfin le conflit d’où elle est née, en 1934, et qui la fonde: «Malgré mon irréprochable père et deux de ses cousines qui ont fait de la Résistance, j’ai l’impression d’être une scène où s’affrontent le christianisme antisémite et le judaïsme persécuté, je peux me raconter que c’est ma famille vichyssoise qui a persécuté ma famille juive.»
Son père, Henri Bourdeau de Fontenay, un avocat acquis au Front populaire, un républicain dont le livre de chevet était «Quatrevingt-treize», d’Hugo, prit le maquis sous le pseudonyme de Seguin, fit partie du comité parisien de la Libération nationale et devint, nommé par de Gaulle, le premier directeur de l’ENA. Un parcours d’autant plus exemplaire qu’il appartenait à une vieille famille ultracatholique, Action française et antisémite. Sa mère, dont la famille fut exterminée à Auschwitz, s’appelait Nessia Hornstein. Née à Odessa, elle était dentiste, blonde et surtout silencieuse, n’évoquant jamais la tragédie qui avait emporté les siens, obligeant sa fille à vivre avec ce secret, lui léguant un devoir d’oubli qu’elle allait transformer en devoir de mémoire.
Très tôt, la moitié juive d’Elisabeth de Fontenay l’a en effet emporté sur sa moitié catholique. A 22 ans, celle qui avait été baptisée et élevée au collège Sainte-Marie abandonna la religion paternelle après avoir découvert que Pie XII «avait laissé faire les nazis sans intervenir». Sa rencontre, en 1968, avec Vladimir Jankélévitch, dont elle fut l’assistante à la Sorbonne, allait être déterminante. Engagée à la fois à gauche et en faveur d’Israël, elle écrivit, en 1973, son premier livre: «les Figures juives de Marx», où elle analysait l’antijudaïsme de l’auteur du «Capital». Après quoi, avec un éblouissement qui n’exclut pas la critique, elle se tourna vers les Lumières.
Chez Elisabeth de Fontenay, la construction de soi est indissociable de la destruction du silence. Car cette philosophe qui a enseigné à la Sorbonne (tout en considérant que la philosophie n’a plus de raison d’être après Auschwitz), porté à la scène Diderot et Michelet, embrassé la cause animale, milité à gauche, lutté contre le capitalisme, présidé la commission Enseignement de la Shoah, n’a eu de cesse de combler le silence – «le puits sans fond» – de sa mère; celui de son frère, victime d’une «maladie de l’esprit»; le sien propre, recouvert par la voix des grands philosophes ; et celui des animaux qu’on extermine à l’abattoir.
On voit par là que c’est une femme de parole, dans les deux acceptions du mot: éloquente et loyale. Stéphane Bou le sait bien, qui a réussi, au fil de cette conversation tourmentée, ardente et passionnante, à faire dire à cette intellectuelle d’exception ce qu’elle n’avait jamais dit: «Chaque âme doit au moins une fois devenir juive.»
Jérôme Garcin
Actes de naissance, par Elisabeth de Fontenay,
entretiens avec Stéphane Bou, Seuil, 210 p., 19 euros.