Un rapport sur l’industrie chinoise de la fourrure Hsieh-Yi, Yi-Chiao, Yu Fu, B. Maas, Mark Rissi © Protection Suisse des Animaux PSA / East-International Janvier 2005 Massacre sans pitié : l'indescriptible horreur des élevages d'animaux à fourrure en Chine. Discours d'ouverture de la conférence de presse organisée par la PSA le 1er février 2005 à Zurich, en Suisse Prononcé par Heinz Lienhard, président de la Protection Suisse des Animaux (PSA) Nous sommes habitués aux conditions d'élevage d'animaux à fourrure de Scandinavie et d'Europe de l'Est, où des centaines de milliers d'animaux sauvages sont détenus en batterie avant de subir une mort brutale au nom de la mode et de la vanité. Des conditions de vie idéales, des lois suffisantes concernant le bien-être des animaux dans les pays producteurs, des animaux heureux parce qu'ils fournissent une fourrure brillante, voilà ce qui est depuis longtemps et mensongèrement clamé par l'industrie. À l'exception de quelques stations chic de sports d'hiver, les manteaux, les capes et autres vêtements en fourrure coûteux ont pratiquement disparu des rues de Suisse. La plupart des gens sont gênés d'être vus habillés de la sorte. D'autres ne veulent pas dépenser des milliers de francs suisses dans ce luxe tape-à-l'œil. Après tout, il y a d'innombrables manières de rester au chaud tout en étant à la mode. Et pourtant la fourrure est toujours une énorme industrie. Toute une chaîne d'acteurs commerciaux en tire profit : éleveurs, agriculteurs, exportateurs, importateurs, grossistes, détaillants, boutiques, grandes surfaces et maisons de couture. Accusant jadis des ventes qui diminuaient sans cesse, ils se sont affairés à développer de nouveaux marchés. Le résultat : des vêtements en fourrure produits en masse et accessibles à tous. Les créateurs de mode ont également proclamé que les garnitures en fourrure étaient chic et « tendance ». Au lieu de manteaux complets, la fourrure orne maintenant tout, des chaussures aux parkas, en passant par les manteaux; même les vêtements pour enfants semblent ne plus pouvoir s'en passer. L'engouement pour la fourrure est partout ! Aujourd'hui, la plupart des fourrures bon marché qui ornent les capuchons et les cols proviennent de Chine, un pays qui domine la plupart des marchés. Il est estimé que la Chine produit, chaque année, plus de 1,5 million de peaux de renard et approximativement le même nombre de peaux de chien viverrin. Les autres espèces communes « produites » en Chine incluent les visons, et même les chiens et les chats. La Chine inonde littéralement le marché de la fourrure avec ses articles ! Cela n'étonnera donc pas que, comme dans les autres pays producteurs, et au mépris de toutes les normes élémentaires du bien-être animal, des millions d'animaux à fourrure y soient détenus dans des cages grillagées et tout aussi scandaleusement exiguës. Jusqu'à il y a quelques semaines, personne ne connaissait la vérité au sujet de la mise à mort des renards et des chiens viverrins dans les élevages chinois. En collaboration avec des protecteurs asiatiques des animaux qui, pour documenter ce sinistre commerce, ont filmé en caméra cachée dans les provinces les plus reculées, la Société suisse de protection des animaux (PSA) révèle aujourd'hui la terrible vérité. Joignant ses forces avec les organismes de conservation et de protection animale, la PSA va aujourd'hui révéler au monde le résultat de ces investigations. L'indescriptible horreur que nous y avons découverte dépasse tout ce que nous savions sur les conditions de vie cauchemardesques et les méthodes de mise à mort brutales utilisées dans les élevages occidentaux. En publiant ces images épouvantables et profondément perturbantes provenant de Chine, nous voulons que tout le monde soit conscient de ce qui se cache vraiment derrière la garniture de son col ou de son capuchon; conscient des conditions de vie dans lesquelles ces animaux vivent et de la façon dont ils sont mis à mort. Cette indescriptible honte n'a aucune place dans un monde dit civilisé. Pour que cela cesse, le public a besoin de connaître la vérité, afin que toute personne responsable et humaine ne veuille plus jamais porter le produit de tant de souffrances. Notre document se concentre sur les renards et autres animaux sauvages. Néanmoins, la Chine exporte aussi les peaux des animaux de compagnie que nous aimons tant. Il ne fait aucun doute que les chiens et chats sont détenus et abattus dans les mêmes conditions atroces que les animaux sauvages. L'an dernier, lors de pourparlers concernant la révision de l'Acte suisse pour la protection des animaux, j'ai personnellement demandé au ministre suisse de l'Économie, Josef Deiss, d'interdire au moins l'importation de fourrures de chiens et de chats en provenance de Chine. Une telle interdiction a déjà été votée aux États-Unis ainsi que dans plusieurs pays européens. Mais ma demande est tombée dans l'oreille d'un sourd. Je vais tenter de présenter ce documentaire à M. Deiss, en espérant qu'il aura l'estomac suffisamment bien accroché pour le visionner. Quatre-vingt mille personnes ont signé la pétition contre l'importation de fourrures de chiens et de chats en provenance de Chine. La PSA l'a déposée à Berne et le Dr Paul Guenter, conseiller national, la fera bientôt suivre au Parlement. Nous ne nous reposerons pas tant que cette abomination ne sera pas bannie de notre pays ! Pour terminer, je voudrais saluer les investigateurs asiatiques qui ont tourné ce documentaire en caméra cachée. Ils ont accepté de prendre d'énormes risques et leurs vies seraient menacées si leurs noms étaient révélés. Pour les protéger, même leurs voix ont été modifiées dans ce reportage. Devant rester anonymes, ils n'auront jamais la reconnaissance et les remerciements du public qu'ils méritent tant. Je profite donc de cette opportunité pour remercier ces courageuses personnes et exprimer tout mon respect et toute mon admiration pour ce qu'elles ont accompli. Puisque nous ne pourrons jamais les remercier en personne, je tenais donc à les saluer ici et publiquement pour leur contribution. Heinz Lienhard *************************************** Résumé Ceci est le tout premier rapport provenant de l'intérieur des élevages chinois d'animaux à fourrure. Des enquêteurs de la Société suisse de protection des animaux (PSA) et de East International ont visité de nombreuses fermes de la province de Hebei. Le nombre d'animaux détenus dans ces lieux varie entre 50 et 6 000. Ce rapport est basé sur des recherches menées en 2004 et en janvier 2005. Il fournit des informations inédites sur l'industrie chinoise de la fourrure, décrit et documente ses pratiques d'élevage et d'abattage. Il situe la Chine dans un contexte global, démontrant que ce pays est le premier exportateur mondial de vêtements de fourrure, ce qui implique des liens directs avec l'Union Européenne et les Etats-Unis. Ce rapport s'achève avec d'urgentes recommandations s'adressant aux responsables politiques, aux revendeurs, aux stylistes ainsi qu'aux consommateurs. Pendant au moins dix ans, l'industrie internationale de la fourrure a financé et coordonné une vaste campagne ayant pour but de dissiper la honte et la mauvaise image rattachées au port de la fourrure. Le mélange de la fourrure avec la soie, la laine, le suède et le cuir, l'emploi de nouvelles techniques comme l'assemblage et le découpage ainsi que de nouvelles couleurs à la mode ont ajouté nouveauté et variété à la fourrure. Le marché de la fourrure, sans cesse croissant, a presque imperceptiblement ramené la fourrure dans nos rues, notamment sous la forme d'accessoires, de vêtements et de chaussures ornés de garnitures de fourrure (que l'on retrouve le plus souvent sur les cols, les écharpes, les capuchons...). Ciblant un public de plus en plus jeune et de plus en plus branché, la fourrure est maintenant incorporée aux vêtements de sport, aux tenues de soirée et de haute couture, sans oublier les vêtements de prêt-à-porter produits en masse et abordables pour tous. | À l'échelle mondiale, les ventes de fourrure ont totalisé quelques 11 milliards de dollars US en 2001-2002. L'Union Européenne, qui est la plus grande consommatrice de fourrure, a vu ses ventes augmenter de façon spectaculaire dès le milieu des années 1990. En 2002-2003, les revenus des ventes de produits en fourrure au sein de l'UE ont été estimés à 4,525 millions de dollars US. . Quatre-vingt-cinq pour cent de la fourrure mondiale provient des fermes d'élevage. La Chine, membre de l'International Fur Trade Federation (IFTF), est la plus grande exportatrice de vêtements de fourrure et, selon les sources de l'industrie, le plus grand pôle de production et de traitement au monde. Entre 25 % et 30 % des fourrures de ce pays proviennent d'animaux sauvages tandis que 70 % à 75 % d'entre elles proviennent d'animaux maintenus en captivité. La Chine est également un des rares pays au monde à ne pas être doté de lois concernant le bien-être des animaux. En Chine, la plupart des élevages d'animaux à fourrure se sont implantés durant les dix dernières années. Les espèces élevées comprennent le renard roux, le renard arctique, le chien viverrin, le vison et le lapin rex. Selon les sources de l'industrie de la fourrure chinoise, un nombre croissant de commerçants, de stylistes et de manufacturiers ont déplacé leur entreprise vers la Chine, la main-d'œuvre peu coûteuse et l'absence de lois sur le bien-être animal rendant la vie plus facile et les marges bénéficiaires plus importantes. | Le secteur mondial de la fourrure est complexe : les peaux produites par les éleveurs doivent traverser plusieurs frontières et subir diverses étapes de traitement avant d'être acheminées au consommateur. Pour l'année 2004, les statistiques du commerce chinois indiquent un volume net d'importations de 330 millions de dollars US et un volume net d'exportations de deux milliards de dollars US. Zhang Shuhua, président de la China Leather Industry Association, a révélé que les importations de fourrures ont augmenté de 54 % et les exportations de 123 % (!) par rapport à l'année 2003. Plus de 95 % des vêtements en fourrure sont vendus à l'étranger, 80 % des exportations en provenance de Hong-Kong partant pour l'Europe, les États-Unis et le Japon. Selon le rapport de Sandy Parker (21 mars 2005), la Chine a exporté aux États-Unis durant le seul mois de janvier 2005 des garnitures de fourrure totalisant la somme effarante de 1,2 million de dollars US. La variété sans cesse grandissante des produits de l'industrie de la fourrure chinoise comprend : peaux, manteaux complets, accessoires tels qu'écharpes et chapeaux ainsi que garnitures de vêtements, jouets et même des meubles. Une enquête faite au hasard dans des boutiques et des grands magasins de Suisse et de Londres a permis de découvrir des étiquettes « Made in China » sur des vêtements en fourrure de grandes marques. En Suisse et dans de nombreux pays européens, l'élevage d'animaux à fourrure a été banni pour des raisons humanitaires. Dans toutes les fermes visitées en Chine, les animaux sont traités brutalement et sont confinés dans des batteries de petites cages grillagées. Des signes d'extrême anxiété et des comportements pathologiques ont été systématiquement observés. La mortalité élevée des petits et les infanticides sont d'autres indicateurs des conditions de vie misérables. | Entre novembre et mars, les renards et les chiens viverrins sont vendus, tués, dépiautés et leurs fourrures traitées. Les animaux sont souvent abattus aux abords des marchés de gros, là où les fermiers les apportent pour les vendre et où les grandes sociétés viennent acheter leurs stocks. Pour arriver là, les animaux sont souvent transportés sur de longues distances et dans d'effroyables conditions. La méthode d'abattage consiste à étourdir l'animal en lui assénant des coups répétés à la tête ou en le balançant sur le sol, tête la première. L'écorchage au couteau commence par le ventre, tandis que l'animal est suspendu par ses pattes arrière à un crochet, la tête en bas. De très nombreux animaux restent pleinement conscients durant ce traitement. Ils luttent désespérément, tentant de se défendre, jusqu'à la fin. Même après que leur peau ait été totalement enlevée, nous avons encore constaté une respiration, des battements de cœur et des mouvements du corps et des paupières, et ce durant cinq à dix minutes. | Ce rapport démontre que les conditions de détention, d'élevage, de transport et d'abattage des animaux servant l'immense industrie chinoise de la fourrure sont inacceptables d'un point de vue vétérinaire et moral. Ces pratiques bafouent le bien-être des animaux et sont à mille lieues des directives de la législation suisse et européenne. Contact - © Protection-des-animaux.org 2005 |